Photo
né en 1926 à Saint-Louis, Sénégal - décédé en 1988 à Bamako, Mali
actif de 1946 jusqu'à env. 1980 à Bamako, Mali
Originaire d'une famille sicilienne installée au XVIe siècle à Fez au Maroc, les générations successives commercent aisément entre le Maroc, le Sénégal, la Mauritanie et le Mali. Le jeune Sakaly travaille pour son père depuis Saint-Louis puis Dakar, la nouvelle capitale du Sénégal.
À 17 ans, il part accompagné de ses deux frères jusqu'au Gabon, envoyé par son père pour étendre son commerce. Se dégageant de ses obligations familiales commerçantes, il arrive en 1946 à Bamako et installe sa "camera box" coiffée d'un drap noir au milieu des autres photographes ambulants sur la place animée de Bagadadjhi. Il a été initié à la photographie par le père de la photographie sénégalaise Meïssa Gaye (1892-1982) pendant sa jeunesse à Saint-Louis du Sénégal.
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En 1956, il ouvre son studio à Medina Coura, en face de l’un des marchés les plus populaires de la capitale du Soudan français. Au début, le travail est difficile, sans grands moyens, appareils bricolés, développant ses films dans des boites de conserves. À l'avènement de l'Indépendance du Mali en 1960, les studios tenus par des Blancs, premières concurrences commerciales, ferment au fur et à mesure. Heureusement, son studio bien organisé avec son salon d'accueil, sa salle de maquillage, l'autre de prise de vue et le laboratoire, devient vite un lieu en vogue dans les années 1960-70.
Le tout Bamako vient se faire photographier chez lui. Les Africains de passage, fort nombreux, viennent aussi pour montrer à leur retour une photographie d'eux prise dans la capitale. Élèves et étudiants veulent avoir une photographie de Sakaly à montrer dans leur village pendant les vacances. Les corps professionnels, policiers, militaires, musiciens ou simples apprentis aiment se faire photographier en groupe pour se souvenir ces moments. Portraitiste mais aussi photographe de reportage, il prend près de 300.000 négatifs 6x6 noir et blanc.
Sakaly est l'un des illustres vétérans de la photographie à Bamako. Souvent, il permet aux jeunes Bamakois intéressés d'utiliser son local et son laboratoire. Photographe exigeant, drôle et généreux, c'est un homme d'amitié et un bon vivant courant infatigablement les nuits de Bamako, même si peu de photographies sont prises alors, l'administration coloniale française réglementant alors la photographie en extérieur.
Ses photographies reflètent ce caractère, saisissant toujours avec tendresse le caractère des Maliens, grands notables comme jeunes apprentis, à cette époque charnière de l'Indépendance où chacun, plein d'espoir, retrouve sa dignité. Il dresse un large portrait de la société malienne. Sans accessoire ni artifice autre que les parures à la mode, Sakaly nous montre un Mali moderne plein d'énergie.
Ses cadrages sont simples, devant la toile peinte ou le rideau tiré, mais s'attache toujours à mettre en avant l'individu et les liens fraternels. Nombre d'amitiés ont été fixées sur sa pellicule, simples amis d'une soirée dansante, amoureux d'un temps, nouveau né d'un jeune couple ou retrouvailles d'une famille.
Ami de Claude Rolin, établi au Mali à l'indépendance et travaillant dans le milieu culturel, celui-ci lui propose de photographier les statuettes pour établir l'inventaire du Musée national du Mali. Sakaly est connu pour le sérieux de son travail.
Vers la fin de sa vie, il délaisse son studio, le laissant à ses fils. Le studio fermera définitivement en 2002. Après la mort d'Abdourahmane Sakaly en 1988, ses enfants Jamal, Naby et Wahal continuent de préserver ce patrimoine inestimable, mémoire d'une époque.
par Mariane Buchet et Jean Loup Pivin, 2012
expositions
- "L'Afrique par elle-même / Africa by Africans", Revue Noire, MEP, Paris 1998 (exposition itinérante jusqu'en 2003 : Brésil, Afrique du Sud, Allemagne, Usa, Angleterre, Italie, Belgique)
- "Africa pelos Africanos", Centro Portugues de Fotografia, Porto 2006
Biographie
- "Photographie africaine / Mozambique", Revue Noire Magazine N°17, décembre 1994
- "Photographes de Bamako" d'Érika Nimis, Revue Noire Éditions, Paris 1998
- "Mali, Niger, Burkina Faso", Revue Noire Magazine N°17, juin 1995
- "L'Afrique par elle-même", par Anne Marie Bouttiaux, Alain D'Hooghe, Pascal Martin Saint Leon, Musée royal d'Afrique centrale de Tervuren et Revue Noire Éditions, Paris 2003
Publications Revue Noire